L’annonce a été relayée par la chaîne Al-Qahera News, citant des sources officielles au palais présidentiel. Le chef de l’État a pris, selon le média, « les mesures constitutionnelles et juridiques nécessaires » pour mettre fin à l’incarcération du militant de 43 ans, condamné en décembre 2021 à cinq ans de prison pour « diffusion de fausses informations ». Bien qu’il ait théoriquement achevé sa peine en septembre 2024, il n’avait pas été libéré.
Sa libération intervient à la suite d’une campagne nationale et internationale. Le Conseil national des droits de l’homme avait saisi début septembre la présidence, plaidant pour une grâce présidentielle au nom de « considérations humanitaires ». La mobilisation des familles, des ONG locales et internationales, mais aussi des chancelleries étrangères, avait particulièrement mis en avant le cas d’Alaa Abdel Fattah, présenté comme le prisonnier politique le plus emblématique d’Égypte.
Un parcours marqué par l’activisme et la répression
Né en 1981 et informaticien de formation, Abdel Fattah s’est imposé dès les années 2000 comme l’un des pionniers du mouvement des blogueurs en Égypte. Ses écrits et son activisme l’ont rapidement propulsé au premier plan des mobilisations politiques. Son rôle central lors de la révolution de 2011, qui a conduit à la chute d’Hosni Moubarak, lui a conféré une notoriété internationale mais aussi une surveillance accrue des autorités.
Arrêté pour la première fois en 2013, il avait connu plusieurs périodes de détention et de libération, avant d’être à nouveau incarcéré en 2019. En 2021, il avait obtenu la nationalité britannique, accentuant la pression diplomatique pour sa libération. Sa mère, la militante Leila Souef, s’était illustrée en menant une grève de la faim afin de dénoncer ses conditions de détention.
Une décision à portée politique
Outre Abdel Fattah, la grâce présidentielle a concerné plusieurs autres prisonniers, parmi lesquels Saeed Magli al-Diw Aliwa, Karam Abdel-Samie Ismail al-Saadani et Mohamed Awad Abdo Mohamed.
Cette décision s’inscrit dans un contexte de réformes annoncées par le président Al-Sissi. Le chef de l’État a récemment demandé au Parlement de réexaminer un projet de loi sur la procédure pénale afin de renforcer la protection de la vie privée, d’élargir les alternatives à la détention provisoire et de mieux encadrer les enquêtes judiciaires.
Un signal à l’international
Pour les observateurs, la libération d’Alaa Abdel Fattah va au-delà du simple geste humanitaire. Elle constitue un message adressé à la communauté internationale, alors que Le Caire cherche à améliorer son image en matière de droits humains tout en conservant un contrôle étroit sur la vie politique intérieure.
MC/MPI