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Mali-Algérie : Bamako saisit officiellement la Cour internationale de Justice après la destruction d’un drone

Bamako-Mali (Mapresse.info) – gouvernement malien a officiellement saisi la Cour internationale de Justice (CIJ) contre l’Algérie, l’accusant d’avoir détruit un drone militaire de reconnaissance malien dans la nuit du 31 mars au 1ᵉʳ avril 2025, au cours d’une mission opérée sur le territoire malien. Cette démarche marque une nouvelle étape dans une crise diplomatique qui s’est progressivement envenimée depuis cet incident.

M'ma Camara
19/09/2025 17:01
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Mali-Algérie : Bamako saisit officiellement la Cour internationale de Justice après la destruction d’un drone

Selon le communiqué du ministère malien des Affaires étrangères, la requête déposée le 16 septembre 2025 à La Haye invoque « une violation manifeste du principe de non-recours à la force », contraire à la Charte des Nations unies, à l’Acte constitutif de l’Union africaine et au Pacte de non-agression et de défense commune.


Bamako affirme que le drone effectuait « une mission de surveillance dans le strict respect de la souveraineté malienne », lorsqu’il a été abattu « sans avertissement préalable » par les forces algériennes.


La requête se fonde sur l’article 40 du Statut de la CIJ et sur l’article 38, paragraphe 5, de son Règlement. Cela signifie que la procédure ne pourra démarrer que si l’Algérie accepte la compétence de la Cour. Le greffe a d’ailleurs rappelé que « la saisine ne produit aucun effet procédural » tant que cette condition n’est pas remplie.


Deux versions irréconciliables


Les faits sont présentés de manière contradictoire par les deux capitales :

 • Version malienne : l’appareil opérait dans la région frontalière de Kidal, près de Tinzaouaten, sur le territoire malien. Son objectif était de collecter des données sur les mouvements de groupes armés.

 • Version algérienne : le drone aurait franchi l’espace aérien algérien, constituant « une violation de souveraineté ». L’armée affirme l’avoir neutralisé après avoir détecté son intrusion par radar.


Ces divergences compliquent toute médiation et rendent essentielle la question des preuves techniques (trajectoire, données satellites, enregistrements radar).


Escalade diplomatique et mesures de rétorsion


L’incident a rapidement débouché sur une crise ouverte. En avril, le Mali, le Burkina Faso et le Niger – regroupés au sein de l’Alliance des États du Sahel (AES) – ont rappelé leurs ambassadeurs à Alger pour consultations. L’Algérie a répondu par le rappel de ses représentants auprès de Bamako et Niamey, et par la suspension de la nomination de son ambassadeur au Burkina Faso.


Les deux pays ont depuis fermé réciproquement leurs espaces aériens aux vols civils et militaires de l’autre partie, compliquant les liaisons régionales déjà fragilisées.


Une dispute dans un contexte tendu


Au-delà du drone, ce différend s’inscrit dans un climat de méfiance durable. Depuis que Bamako a rompu en janvier 2024 le processus de paix négocié à Alger avec les groupes armés du Nord, les relations se sont dégradées. L’Algérie, qui se veut médiateur historique, se retrouve désormais perçue comme un acteur partial par la junte malienne.


Le renforcement des moyens militaires maliens, notamment avec des drones turcs et des avions de fabrication russe, a accentué les risques d’incidents frontaliers. Pour Alger, la sécurisation de sa frontière sud est une priorité face aux trafics et à l’activisme de groupes armés transnationaux.


Enjeux et perspectives

 • Souveraineté : Bamako cherche à obtenir une reconnaissance juridique de ce qu’il considère comme une atteinte grave à son intégrité territoriale.

 • Précédent juridique : Si la CIJ est amenée à trancher, l’affaire pourrait faire jurisprudence sur l’usage des drones et la protection des espaces aériens en Afrique.

 • Stabilité régionale : La crise compromet les efforts de coopération régionale contre le terrorisme, déjà fragiles dans la zone sahélienne.

 • Issue incertaine : L’Algérie n’a pour l’instant donné aucun signe d’acceptation de la compétence de la Cour. En cas de refus, la plainte malienne resterait lettre morte sur le plan judiciaire, tout en conservant une valeur politique et symbolique.


Une bataille à double front


En portant l’affaire devant la CIJ, Bamako entend déplacer le différend du terrain militaire vers le champ diplomatique et juridique. Mais la procédure reste suspendue à la décision d’Alger. En attendant, la rupture de confiance entre les deux capitales fragilise davantage l’équilibre régional, au moment où le Sahel fait face à une recrudescence des attaques djihadistes et à un isolement diplomatique croissant des régimes militaires.


MC/MPI


Informations complémentaires

Source : Maliweb

Localisation : Mali (Mapresse.info)